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 Président de l'association VENT D'OUEST

Problématiques de Bretagne

15 Novembre 2013 , Rédigé par Daniel Gilles Publié dans #Politique régionale

Vent mauvais ou vent d'ouest tonique

pour préparer l'avenir

 

Une contribution de Daniel Gilles,

Vice-Président du Conseil régional de Bretagne,

délégué régional du MUP Bretagne

 

La Bretagne est sous les feux de l'actualité, avec des éléments, comme dans d'autres régions, de crise économique et sociale, des mécontentements, des colères, du mouvement social désordonné mais médiatisé, une application hésitante de politiques et de mesures de la part du gouvernement. Dans cette région, l'électorat, après avoir connu un mouvement profond pour se sortir des dominations de droite et du conservatisme, après avoir porté avec élan les progrès populaires d'une gauche imaginative, semble  s'interroger, douter, hésiter à avancer sur les évolutions nécessaires d'un 21ème siecle marqué par des défis économiques, financiers, sociaux, humains et écologiques.

Le fond de forme est relativement connu : le modèle breton de développement du XXème siècle, autour notamment de l'agriculture et de l'agro alimentaire, est confronté aux mécanismes d' une concurrrence mondialisée et subit les logiques d'un capitalisme financier, du dumping social en Europe et dans le monde entrainant une série de «casses» aux conséquences humaines et territoriales souvent dévastatrices. Des décisions fiscales pour le moins peu judicieuses et surtout bien peu admises comme «justes» ont concentré diverses «révoltes» et permis un rassemblement hétéroclite tourné largement contre le gouvernement, le président et la majorité des élus de progrès.

Si le monde paysan, avec un certain activisme déjà déployé par le passé, est coutumier d'actions visant souvent l'administration, cette fois, il a pu prendre appui sur l'imagerie liée à une référence historique ancienne (révoltes dites des bonnets rouges et du papier timbré) de la fin du 18ème siècle en Bretagne. Cet épisode historique avait tout à la fois constitué une remise en cause de l'ordre féodal et les prémisses de la révolution (intervenue près d'un siècle plus tard) avec des intellectuels organiques et des cahiers de doléances. D'un même élan, il a cimenté une réaction contre l'ordre royal et le clan Colbert qui s'employait à asséner des impots dans l'ouest de la France et la région bretonne relativement autonomes pour mener grand train et faire la guerre dite de Hollande...!

Tous les médias ont pu replonger dans ce moment d'histoire nationale interessant, mais les réalités du 21ème siècle ne permettent pas d'en rester à certaines analogies trop rapides.

L'écotaxe, point d'entrée du mouvement, est un concept complexe né de certaines préoccupations légitimes «écologistes» et des cogitations dites de grenelle sous N.Sarkozy avec comme acteurs notamment JL Borloo, NKM …. Cela a débouché sur un système abscons de taxation des camions empruntant certaines infrastructures routières avec une mise en oeuvre très «big brother»et en même temps très visible, complexe, couteux et de surcroit délégué au privé...

Le «changement» n'ayant pas aboli cette usine à gaz, ce sont les hiérarques de Bercy qui, une nouvelle fois, ont «finalisé» le monstre technocrate avec, il faut bien le dire, une vraie faiblesse de direction, concrète et dans la durée, de ce ministère pourtant central.

Bien des acteurs et divers forces se sont précipités dans la brèche et, comme le suggéraient il y a peu quelques élus et militants chevronnés du progrès breton, les médias ont pu réalisé à Quimper, devenue l'épicentre du mouvement, une photo symbolique où coiffés d'un bonnet rouge commercialisé par Armorlux (celui de la marinière....), le maire «anarcho situationniste» de Carhaix, Troadec, le député UMP de la droite profonde des côtes d'armor, Le Fur, certains patrons du Medef, de la Fdsea ou de la grande distribution, mais aussi tel responsable du NPA ou tel indépendantiste breton, posent ensemble sur fond de soutien des opposants sectaires au mariage pour tous...

Mais bien évidemment, il y avait aussi en Bretagne beaucoup de gens sincères, en souffrance, angoissés pour leur avenir et celui de leurs enfants, des forces syndicales ou associatives dont certaines avaient éssayé d'organiser une expression différente.

Devant l'évidence d'un systeme inapplicable et la prise de conscience réelle du danger de la part d'un «pack breton» autour de ministres comme J-Y. Le Drian, S. Le Foll ou M-L. Lebranchu, de nombre de parlementaires et élus de la région, le pouvoir a dû tardivement reculer, reporter la mesure sine die et annoncer un pacte d'avenir qui explore des pistes davantage au niveau des défis actuels.

Car au-delà d'une nouvelle taxe, c'est bien d'une nouvelle croissance, de nouveaux challenges et modèles, de nouvelles infrastructures et équipements dont la Bretagne, dans ce secteur comme plus généralement, a besoin. Ce qui, très probablement, nécessite en France et en Europe de réguler une concurrence exacerbée, donc d'imaginer et de travailler à de véritables convergences sociale et financière en Europe (le projet européeen est entièrement à repenser), personne ne pouvant justifier dans la durée ni les considérable inégalités et évasions fiscales ni admettre que l'on puisse rémunérer le travail des populations migrantes à 4 euros de l'heure. Il s'agit de même de chercher à maitriser de nouvelles coopérations et échanges mondiaux à l'image de l'exemple d'un investissement chinois dans la production de lait en poudre à Carhaix, ou d'autres dans les filières de l'agro...Cela nécessite une action publique volontariste, des lignes significatives dans les contrats de plans, l'affectation de fonds européens ou autres, comme cela necessite d'encourager des entrepreneurs, des investisseurs qui ont besoin de confiance, de permettre à ce que le monde de la recherche et du travail soit sécurisé et justement intéressé et responsabilisé.

Par delà les critiques faites aux mécanismes d'exploitation et de domination à l'oeuvre, il s'agit bien aussi de pouvoir créer les conditions en Bretagne comme en France d'un rassemblement porteur d'ambition, d'espérance et de justice.

Si, en Bretagne et dans le pays, les mois qui viennent ne permettaient pas d'engager ce mouvement nécessaire pour redresser le pays, retrouver les voies d'une nouvelle croissance, mettre en oeuvre les réformes progressistes, alors le danger serait grand pour le progrès, la démocratie et le risque d'un chaos politique mortifère bien réel

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